jeudi 17 juillet 2008

"Les racines du mal", Maurice G. Dantec



Pour les plus jeunes d'entre vous, il faut tout d'abord signaler quelque chose : Il fut un temps naguère où Maurice G. Dantec écrivait des livres non seulement compréhensibles par la majorité des êtres humains, mais qui plus est, des bons livres. Cela peut sembler curieux pour ceux qui se sont essayé à ses derniers ouvrages en date.
On a l'impression que Dantec a subi de plein fouet le bug de l'an 2000. Trois romans noirs géniaux ( "Les Racines Du Mal", "La Sirène Rouge" et "Babylon Babies" et puis...plus rien. Le vide. Non. Plutôt l'inverse : le remplissage, le dégueulis littéraire. Dans ses romans suivants ( "Villa Vortex", "Cosmos Incorporated", "Grande jonction"), seules quelques dizaines de pages restent compréhensibles au milieu des délires des circonvolutions de son cerveau. Pour être franc, moi, j'arrête les frais. Ça fait 8 ans que j'attends le retour de l'étincelle. Je n'y crois plus.

Parce que "Les Racines Du Mal" est tout simplement génial. Le meilleur roman noir qu'il m'ait été donné de lire. Et que j'ai du mal à comprendre que c'est le même écrivain qui a écrit "Villa Vortex".
J'ai acheté ce livre un peu au hasard. Clairement, je ne suis pas grand fan de romans noirs mais deux choses ont attiré mon attention sur ce livre en particulier : tout d'abord, je venais de voir quelques jours auparavant une interview de Dantec dans « Nulle Part Ailleurs », sur Canal + que j'avais trouvé intéressante ( rien à voir avec l'incompréhension que fait naître en vous ses interviews récentes et cet arrière-gout malsain qu'elles vous laissent après). Et ensuite, en feuilletant le livre dans une librairie, j'ai été harponné par la première phrase du livre :
« Andreas Schaltzmann s'est mis à tuer parce que son estomac pourrissait ».
Andreas Schaltzmann, paranoïaque, est persuadé que les Aliens, en provenance de la planète Vega ont infiltré la planète Terre et qu'ils prennent petit à petit le contrôle de celle-ci. Andreas sait qu'il est un des seuls à comprendre et même savoir ce qu'il se passe et que c'est à lui d'organiser la résistance. Il commence à tuer. Un peu au hasard, selon les divagations de ses pensées qui lui laissent de moins en moins de moments de calme et de contrôle relatif de lui-même. Et alors que les mailles du filet de la police se mettent à se resserrer dangereusement autour de lui, il part pour une folle cavalcade meurtrière à travers la France.
Après son arrestation, on l'accuse de meurtres qu'il n'a pas commis. Une petite équipe de médecins et chercheurs va croire en son innocence pour certains meurtres et mener son enquête, aidée par un ordinateur surpuissant, une neuromatrice. En approfondissant les indices et en élargissant les recherche, il vont découvrir quelque chose de beaucoup plus grand, de monstrueux, d'innommable.

Il est difficile d'en dire plus sans dévoiler des éléments importants du livre, gâchant le plaisir de ceux qui voudront le lire. La version poche du livre fait environ 650 pages mais à chaque fois que j'ai lu le livre, c'était réglé en un jour ou deux tant on a du mal à s'en arracher.
Un livre à lire absolument.
A noter tout de même que de nombreux passages sont très crus et difficiles à lire. Même si l'auteur ne s'appesantit pas dans le morbide, les crimes sont souvent perpétrés avec de nombreux actes de barbarie par leurs auteurs, avec des scénarios de plus en plus travaillés pour obtenir des morts lentes et douloureuses. Un livre donc à ne pas conseiller à des personnes émotives ou à des lecteurs trop jeunes. Pour ceux qui n'auraient pas réussi à lire "American Psycho" de Bret Eason Ellis jusqu'au bout ( et j'en connais quelques uns ), ce n'est pas la peine d'essayer "Les Racines Du Mal".
Je ne suis pas un spécialiste du roman noir, mais je pense que ceux qui aimeront Dantec aimeront certainement aussi "Necropolis" de Herbert Lieberman. Ceux qui aimeront "Les Racines Du Mal" devraient essayer "American Psycho", ou "L'interprétation des meurtres" de Jed Rubenfeld.

Aucun commentaire: